La Nature pour seule inspiration

Un jeudi midi au sortir de l’hiver, à la table des Jardins Sauvages. Dans l’assiette 100 % Bio, une trilogie d’un même légume de saison, travaillé en déclinaisons de saveurs et de textures, parsemée de pétales de calendula. Et agrémentée d’un pesto… de fanes de navets. Rien que de plus normal pour Gilles Le Gallès, le Chef breton «Biolocavore et fier de l’être» du restaurant gastronomique de La Grée des Landes.

«Dans ma cuisine, on essaie de tout utiliser. Car tout se mange!» Et si ce n’est cru, alors frit – juste quelques feuilles pour le plaisir du croustillant – braisé ou en émulsion. Du moment que le produit est cultivé en Bio dans le respect des rythmes de la Nature, sous le ciel de La Gacilly ou dans un rayon de moins de 50 km. Gilles le Gallès n’est pas homme à marcher plus vite que la musique, ni à s’en laisser conter par la complexité de faire du neuf avec ce qui pourrait être perçu comme routinier. Alors, du pesto en hiver ? C’est permis quand l’ingrédient principal devient l’inventivité. «Le passage de l’hiver au printemps est la période la plus délicate en cuisine quand on respecte le tempo naturel. Il faut voir avec un œil nouveau les légumes-racines, avant de pouvoir les associer aux primeurs qui viennent. Nous n’avons pas droit à la lassitude !»

Gilles LeGalles

Un devoir de créativité
Car de l’avis même du Chef, la Nature a sûrement une bonne raison de nous faire patienter. Peut-être tout simplement parce que le temps des légumes de printemps n’est pas encore venu. Pour cette année et en ce lieu précis. En vrai Breton (sagement) têtu, Gilles Le Gallès en a pris son parti : il met tout son métier au service de ce devoir de créativité. Son inspiration, il la puise encore et toujours dans cette Nature qui, certes, impose ses contraintes mais se montre incroyablement inventive et généreuse! On peut le voir au petit matin arpenter les jardins en quête de plantes sauvages qu’il collecte avec ravissement. Verse, plantain, oseille sauvage des fossés, cresson de terre du potager adjacent… pour certains juste des «mauvaises herbes» mais pour lui des trésors de goût. Tout comme les fleurs, aux saveurs doucement poivrées, qui colorent souvent ses assiettes en touches impressionnistes. Sa belle surprise du jour : des calendulas qui ont refleuri spontanément après avoir passé l’hiver sur la butte, sur l’autre versant de la colline. Ceux-là même qui, ce midi, éclairent les entrées d’une touche de soleil.

potager

«80 % de végétal, c’est parfait !»
On l’aura compris, «aux Jardins Sauvages» la gastronomie fait la part belle au végétal. Une posture assez rare et précieuse pour être soulignée. Si l’injonction du 100 % bio et local est en parfaite adéquation avec l’esprit des lieux, le parti pris de ne proposer que très peu de viande ou de poisson est une posture presque militante. Farouchement défendue par son Chef. «Nos modes de production et nos habitudes alimentaires occidentales font que, partout, la norme dans les assiettes, c’est 80 % de protéines animales pour 20 % de végétal. Cette dominante devrait être inversée, notre organisme ne s’en porterait que mieux – et notre Planète aussi… 80 % de végétal c’est parfait!» Après s’être régalé de façon «consciente et responsable» à la table de Gilles Le Gallès, on ne peut qu’approuver.

plat vegetale